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Atteindre la carboneutralité dans les Maritimes: possible, mais à condition de faire preuve d’audace

Le reste du Canada peut se féliciter d’une année riche en investissements et en emplois sobres en carbone. Comment les Maritimes peuvent-elles rester dans la course?

Cet article a précédemment été publié dans Saltwire.

Pour atteindre les objectifs de carboneutralité, les plus grandes économies du Canada compétitionnent sur un marché où la demande est exponentielle. Au Québec, de nouvelles usines de fabrication de batteries se construisent. La Colombie-Britannique augmente sa production de biocarburants. En Ontario, les fabricants automobiles réarrangent leurs installations pour la production de voitures électriques et les aciéries s’électrifient pour réduire radicalement leurs émissions de gaz à effet de serre.

Quant aux Maritimes, les investissements sobres en carbone y sont plus rares, moins importants et moins visibles, bien que la région démontre des progrès non négligeables, cruciaux pour le déploiement à grande échelle de nouvelles possibilités et pour l’avenir de la région.

Dans une nouvelle analyse de l’Institut climatique du Canada, on compare les façons dont les provinces concrétisent les possibilités d’investissement sobres en carbone. L’élan de croissance propre est significatif partout au Canada, y compris dans les Maritimes.

La transition vers la carboneutralité créera de profonds changements sur le marché mondial. La demande baissera de façon importante dans certains secteurs, comme le secteur pétrolier et gazier, alors que d’autres filières, comme l’industrie lourde et le secteur manufacturier, pourraient bénéficier de cette transition, mais voir la compétition internationale s’intensifier pour la réduction puis l’élimination des émissions de carbone.

Tendre vers la carboneutralité, c’est également engendrer la création de nouveaux marchés au grand potentiel de croissance. La demande dans des secteurs comme l’électricité propre, les batteries et le stockage d’énergie, la décarbonisation industrielle et les technologies agricoles sobres en carbone devrait atteindre des sommets au cours des prochaines années. Chaque région du Canada, dont les Maritimes, doit assurer l’avenir de son économie, de ses emplois et de ses revenus en investissant dans cette transition.

Les Maritimes sont déjà sur la bonne voie. Il y a présentement au moins 50 entreprises prenant part à des marchés où l’on s’attend à voir la demande mondiale augmenter. Plus des trois quarts de leurs sièges sociaux se trouvent en Nouvelle-Écosse.

Quelques-unes de ces nouvelles entreprises font l’objet d’importants investissements privés et font affaire avec de grands noms de l’industrie. Par exemple, Resson, du Nouveau-Brunswick et TruLeaf, de la Nouvelle-Écosse, travaillent avec McCain Foods au déploiement de leurs technologies agricoles sobres en carbone. En tout, les entreprises des Maritimes qui se consacrent à des activités carboneutres ont amassé 225 millions de dollars dans les 10 dernières années, et la tendance continue de s’accélérer.

Les Maritimes se spécialisent également dans des domaines comme les réseaux intelligents, les batteries et le stockage, l’énergie éolienne, le transport maritime, les petits réacteurs modulaires, les technologies océaniques et les technologies agricoles.

Malgré ce succès, la situation est toujours susceptible de s’améliorer. En général, les entreprises des Maritimes qui se consacrent à la transition vers la carboneutralité sont plus petites, moins profitables, et attirent des investissements moindres qu’ailleurs au pays.

La Nouvelle-Écosse est la première province maritime et la troisième au pays au chapitre des investissements dans les entreprises visant la carboneutralité. Cependant, même après ajustement à l’échelle de chaque économie provinciale, les deux provinces en tête, le Québec et la Colombie-Britannique, ont reçu plus du triple des investissements recueillis en Nouvelle-Écosse. Présentement, les Maritimes ne comptent qu’une seule entreprise (ARC Clean Energy) ayant amassé plus de 50 millions de dollars en investissements, et une seule société ouverte (Meta Materials).

Donc, comment attirer de nouvelles possibilités? Les Maritimes peuvent suivre l’exemple d’autres provinces ayant déjà réduit les risques relatifs à l’innovation, attirant ainsi plus d’investissements pour concrétiser cette transition vers la carboneutralité.

Des politiques climatiques claires et ambitieuses, un prix du carbone prévisible et à long terme, voilà les clés pour donner confiance aux investisseurs et rendre les projets plus attrayants. Des politiques ciblées comme des normes de construction et des règles pour les marchés publics sobres en carbone contribueraient à augmenter la demande locale pour les entreprises des Maritimes.

Les gouvernements et les organismes de développement économique peuvent également mettre les entreprises des Maritimes en contact avec de grands acheteurs canadiens, au bénéfice de tous les acteurs. Le marché des Maritimes étant petit, sa capacité à accueillir des projets de démonstration est limitée. Quelques entreprises de la région ont déjà réussi à faire leur marque ailleurs au Canada, comme le récent projet de captation du carbone dans le ciment de CarbonCure, à l’aéroport international de Calgary.

Depuis plusieurs années maintenant, les provinces maritimes ont une longueur d’avance au Canada quant au découplage des émissions de carbone du PIB et de la création d’emplois. Elles ont d’excellents établissements de recherche universitaire et un petit nombre d’entreprises – appelé à croître – prêtes à répondre à la demande mondiale croissante en biens et services permettant d’atteindre la carboneutralité. Pour les Maritimes, l’avenir des emplois, des entreprises et des innovations sobres en carbone est prometteur. Cependant, elles devront savoir se tailler une place dans un nouveau marché en expansion parmi les gros joueurs que représentent les autres provinces canadiennes.

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