Améliorer les politiques sur l’électricité pour permettre à l’Ontario de faire des affaires

Quatre façons d’améliorer le cadre de planification énergétique de la province.

Une électricité abondante, propre et abordable est de plus en plus nécessaire au développement économique local. Malheureusement, l’Ontario l’a appris à ses dépens.

La province a déjà raté des occasions de croissance économique et de création d’emplois en raison notamment d’un approvisionnement insuffisant en électricité. Mais ce n’est pas le seul problème : même si le réseau électrique de l’Ontario est reconnu comme l’un des plus propres au monde, les émissions de gaz à effet de serre générées par la production d’électricité sont appelées à augmenter alors que les centrales nucléaires s’éteignent pour être rénovées ou carrément fermées, et que les centrales au gaz naturel prennent leur place.  

Si le gouvernement de l’Ontario souhaite que la province puisse faire des affaires, il se doit d’être sérieux dans ses démarches de construction d’infrastructures électriques et de nettoyage du réseau, et d’en limiter les coûts.

Il y a des raisons d’y croire

Même si la modernisation du réseau électrique n’est pas tâche facile, le premier pas à faire est plutôt simple : réformer le cadre de planification énergétique de longue date de la province. 

La bonne nouvelle, c’est que l’Ontario ne part pas de zéro sur ce point. En effet, la province a une longue (et complexe) histoire de création de plans énergétiques à long terme, qui commence par l’obligation de créer un plan de réseau électrique intégré (le prédécesseur de l’actuel Plan énergétique à long terme) en vertu de la Loi de 1998 sur l’électricité.

Cependant, étant donné l’état actuel du réseau électrique de la province, il est clair que le plan de longue date doit être repensé. 

Heureusement, le gouvernement est du même avis. Au début de 2021, la province a mis sur pause le processus du Plan énergétique à long terme et lancé des consultations pour améliorer la prévisibilité, la transparence et la fiabilité de la prise de décisions. Le résultat de ces réformes est d’une grande importance pour l’avenir du réseau électrique.

Quatre façons d’améliorer le processus de planification énergétique de l’Ontario

L’Institut climatique du Canada a beaucoup réfléchi aux façons d’améliorer les structures de gouvernance et les processus pour assurer la viabilité des réseaux électriques. Dans le présent article, nous mettons en lumière quatre façons de bonifier le processus de planification énergétique de l’Ontario et d’ainsi contribuer au développement économique.

  1. Clarifier les cibles d’émissions à long terme 

Si l’Ontario a établi une cible d’émissions pour 2030, il n’a aucun objectif à plus long terme. Les cibles à long terme donnent une vision claire aux investisseurs et aux acteurs du système de la direction que prendront les futures politiques climatiques et le réseau électrique. Clarifier les objectifs climatiques de la province est une première étape importante vers une planification solide du réseau électrique.

  1. Élargir les mandats principaux de la commission de la CEO et de la SIERE pour atteindre les objectifs climatiques

Actuellement, la Commission de l’énergie de l’Ontario (CEO) et la Société indépendante d’exploitation du réseau d’électricité (SIERE) n’ont pas de mandat clair pour intégrer les changements climatiques à leurs processus décisionnels. En pratique, cela signifie que leurs principaux objectifs de fiabilité et d’efficacité économique peuvent être interprétés comme étant contraires aux investissements compatibles avec la carboneutralité, par exemple ceux visant une augmentation de la production d’électricité propre ou la construction de nouvelles infrastructures de transport, puisque ces derniers peuvent être coûteux à court terme pour les consommateurs.

Pour réduire l’incertitude, le gouvernement devrait clarifier les mandats de la CEO et de la SIERE pour y inclure les objectifs climatiques – à la fois la réduction des émissions et la résilience aux conséquences des changements climatiques – tout en respectant les mandats centraux de fiabilité et d’abordabilité des services. 

  1. Reprendre et réformer la planification à long terme pour guider le travail des acteurs du système

En théorie, le processus de planification énergétique de l’Ontario est régi par le Plan énergétique à long terme, qui décrit les priorités et les objectifs gouvernementaux pour le secteur. Le gouvernement pourrait donner quelques directives à la SIERE et à la CEO pour qu’elles mettent en application certains aspects du Plan énergétique à long terme; ces plans de mise en œuvre seraient ensuite révisés et approuvés par le gouvernement. Pourtant, en pratique, le gouvernement a adopté une approche plus ponctuelle, donnant plus d’une centaine de directives à la SIERE et à la CEO. Ce processus imprévisible complique la planification systémique, augmente le risque d’intervention politique et nuit au développement économique, car le secteur privé ne sait plus à quoi s’en tenir. 

Le gouvernement devrait continuer à adopter une vision d’ensemble du secteur avec un plan énergétique exhaustif, qu’il s’agisse du Plan énergétique à long terme ou non. Ce plan devrait clarifier notamment les objectifs d’électrification et le rôle du réseau gazier, et prendre en compte les demandes futures en électricité. Il devrait contenir des données précises, mais également refléter l’incertitude en utilisant des fourchettes et des scénarios. Il devrait également comprendre des échéanciers, des rôles et des responsabilités, et des indicateurs de réussite. En même temps, ce plan ne devrait pas être trop prescriptif, laissant la liberté et la flexibilité à la SIERE et à la CEO de traduire la vision du gouvernement dans leurs actions d’une façon à maintenir la fiabilité et l’abordabilité.

Enfin, la transparence et la reddition de comptes sont des lacunes des processus de planification et de prise de décisions actuels relatifs au Plan énergétique à long terme. Une des solutions consiste à donner à la CEO un mandat de surveillance accru, qui comprendrait la révision des plans de la SIERE ou d’autres parties du processus de planification.

  1. Fournir des rapports périodiques sur la trajectoire technique

Plus tôt cette année, le gouvernement ontarien a annoncé qu’il prévoyait commander une étude de trajectoire indépendante pour comprendre comment bien préparer le système énergétique pour l’électrification. Bien que cette étude semble ponctuelle, le gouvernement devrait planifier des évaluations périodiques pour s’assurer que l’information soit à jour et pertinente pour les décideurs et les planificateurs du système. Les options technologiques et les coûts évoluant constamment, ces évaluations devraient être révisées tous les trois à cinq ans. Pour plus de  crédibilité et d’autonomie, ces études devraient également être réalisées par des agences gouvernementales, des chercheurs universitaires ou des instituts de recherche crédibles en toute indépendance.

Place à la croissance

L’électricité propre est essentielle pour que la province conserve son statut de vecteur de croissance économique. Toutefois, transformer un réseau électrique provincial ne se fait pas du jour au lendemain. Des modifications au cadre de planification énergétique de la province peuvent aider à ramener les objectifs économiques, environnementaux, sociaux et autres au premier plan et à s’assurer que tous les acteurs du système vont dans la même direction. Si l’Ontario passe à côté de cette réforme de gouvernance, le réseau électrique risque d’en souffrir, avec de sérieuses conséquences sur le développement économique, le climat et le bien-être des Ontariens.

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