
Des risques à nos portes
Construire de nouveaux logements à l’abri des impacts climatiques

Il sera essentiel de bâtir plus de logements au Canada pour améliorer leur abordabilité. Mais si l’on ignore le danger des inondations et des feux de forêt toujours plus fréquents et extrêmes, tout le monde risque d’en payer la facture.
Le logement le plus abordable est celui qui n’a pas à être reconstruit.
Pour atteindre les cibles d’abordabilité du logement, on estime qu’il faudra 5,8 millions de nouveaux logis d’ici 2030 : cela représente une augmentation de 35 % du parc canadien actuel.

Mais si les politiques existantes ne changent pas, des centaines de milliers de nouveaux logements seront bâtis dans des zones vulnérables aux inondations et aux feux de forêt, ce qui met la population à risque et lui coûtera des milliards de dollars chaque année.
Il suffit pourtant aux gouvernements de revoir leurs politiques pour rediriger un petit pourcentage des nouvelles constructions en lieu sûr afin de réduire considérablement les risques d’inondations et de feux de forêt, de prévenir la flambée des coûts, et d’améliorer l’abordabilité.
Notre rapport, Des risques à nos portes : construire de nouveaux logements à l’abri des impacts climatiques, montre comment le pays pourrait répondre aux besoins en logements de la population tout en la protégeant contre un climat changeant. Il est le premier en son genre au Canada à quantifier le risque économique de bâtir des habitations là où les inondations et feux de forêt sont probables et fréquents. Le rapport fait des recommandations pour écarter la construction des zones les plus dangereuses, et du coup faire épargner des milliards de dollars au pays tout en aidant à maintenir les gens à l’abri de catastrophes perturbatrices.
Faites défiler la page pour découvrir les principaux constats et les grandes recommandations, ou téléchargez le rapport.
Les inondations et les feux de forêt sont une menace grandissante
Les inondations et les feux de forêt représentent la plus grande menace climatique pour le parc de logements du Canada, et pourtant, on continue de construire de nouvelles habitations dans les zones à haut risque. Ces catastrophes, combinées aux autres phénomènes météorologiques extrêmes, ont fait de 2024 l’année de loin la plus coûteuse dans l’histoire du pays, fracassant tous les records de dommages assurés.
C’est incontestable, il faut bâtir plus de logements au Canada pour faire baisser les prix, mais l’accélération de la construction pourrait en fait empirer le problème si les gouvernements ne revoient pas leurs politiques afin de diriger les nouveaux chantiers en lieu sûr.

Les politiques en place ne protègent pas les nouveaux logements contre les risques grandissants d’inondation
Notre analyse montre qu’au Canada, plus de 540 000 logements pourraient être bâtis d’ici 2030 dans des zones à risque d’inondation, et être à la source de plus de 2 milliards de dollars de dommages additionnels chaque année uniquement en dégâts d’eau.
Les contrecoups de ces nouveaux sinistres varieront à l’échelle du pays, mais c’est au Manitoba et au Yukon où la facture serait la plus salée : on estime qu’on y essuiera 1 200 $ en pertes additionnelles par année pour chaque bâtiment résidentiel qui s’ajoutera.


Les pertes dues aux feux de forêt pourraient doubler d’ici 2030
Les nouveaux logements au Canada pourraient faire plus que doubler les pertes totales nationales attribuables aux feux de forêt, et les faire presque tripler en Colombie-Britannique. On pourrait voir 92 % des nouvelles pertes se concentrer dans seulement 20 municipalités, pour la majorité britanno-colombiennes.


Les dommages causés annuellement par les inondations et les feux pourraient grimper dans les milliards de dollars
La construction en zone vulnérable aux inondations ou aux feux de forêt est lourde de répercussions pour le Canada, où les dommages combinés aux nouveaux bâtiments résidentiels pourraient atteindre les 3 milliards de dollars par année.
Les pertes annuelles causées par les inondations grimperaient de 330 millions de dollars d’ici 2030 dans un scénario optimiste, et de 2 milliards dans un scénario pessimiste. Les dommages causés par les feux de forêt pourraient alourdir le bilan de 1,1 milliard de plus par année.
Les coûts seront répartis inéquitablement au Canada
Les coûts les plus élevés attribuables aux inondations seront répartis dans d’importants centres urbains du pays, alors que les dommages des feux seront concentrés dans l’Ouest.
La Colombie-Britannique s’apprête à bâtir un volume disproportionné de nouveaux logements dans des zones à haut risque, et sera à la source de la plus grande partie des nouvelles pertes financières attribuables aux inondations et aux feux de forêt à l’échelle nationale. Les nouveaux logements exposés pourraient introduire un risque financier surpassant 2 milliards de dollars par an – et un potentiel de pertes à coup de centaines de millions pour plusieurs localités annuellement.
Vient ensuite le Manitoba, avec la deuxième hausse des dommages la plus élevée à être projetée : plus de 375 millions de dollars par année. Il est aussi l’une des cinq provinces qui devraient voir le plus augmenter la facture totale des dommages dus aux inondations.
C’est l’Ontario qui verra se bâtir le plus grand nombre de nouveaux logements… y compris dans des zones à haut risque, ce qui viendra alourdir les dommages attribuables aux feux et aux inondations. Cela dit, pour ce second type de sinistre, l’Ontario a une réglementation stricte qui réduit les risques depuis des décennies et qui maintiendra les pertes par habitation à l’un des taux les plus bas au pays. Il suffirait de renforcer encore cette assise pour juguler le risque futur.
Le Québec est l’une des quatre provinces où l’on projette la plus grande hausse des dommages sous l’effet des inondations : on parle de potentiellement 210 millions de dollars de plus annuellement, même si la Belle Province a travaillé sur ses politiques afin d’atténuer les risques de submersion côtière et riveraine et de restreindre l’aide versée pour les nouveaux logements en zone vulnérable.
L’Alberta subira dans les années qui viennent une augmentation considérable des risques d’inondation et de feu incontrôlé touchant ses nouvelles habitations. Si rien n’est fait sur le plan des politiques, la facture pourrait gonfler de 250 millions de dollars chaque année.

Les politiques d’utilisation du territoire laxistes favorisent la construction risquée
Dans la plupart des provinces et territoires, les politiques sur l’utilisation du territoire sont lacunaires, laissant libre cours à la construction de logements en zone à haut risque d’inondation et de feu incontrôlé. Ce laxisme exacerbe les lacunes d’autres politiques et, combiné à la pression de construire des millions d’habitations le plus vite possible ainsi qu’au manque d’information, encourage un développement résidentiel risqué qui finira par coûter des milliards et par mettre la vie des gens en danger.
À moins que les politiques ne soient renforcées, le boom immobilier au Canada va alourdir le coût de la vie pour les propriétaires comme les locataires qui, installés en zone à haut risque, seront accablés de réparations fréquentes et dispendieuses. Et c’est tous les Canadiens qui vont éponger la note, que ce soit par la hausse perpétuelle de leurs primes d’assurance et le financement par leurs impôts des mesures gouvernementales de rétablissement après sinistre, même s’ils ne vivent pas dans les secteurs particulièrement vulnérables.

Les communautés autochtones ont les plus grands obstacles à franchir pour bâtir des logements résilients au climat
Nous avons commandé à Shared Value Solutions un rapport complémentaire sur le logement autochtone et la résilience climatique (en anglais) afin d’étudier les problèmes spécifiques que rencontrent les Premières Nations pour bâtir des logements résilients au climat dans leurs réserves.
Elles affrontent des obstacles pour atténuer les risques d’inondation et d’incendie que courent les nouvelles habitations sur leur territoire, notamment des lacunes sur le plan infrastructurel, un besoin criant de logements, et une grande vulnérabilité aux inondations, aux feux de forêt, à la chaleur extrême et à la fonte du pergélisol. À cela s’ajoutent des problèmes de capacité, une autorité de décision restreinte, un choix limité de terres, une communication inadéquate de l’information, et des contraintes de financement. Les politiques et pratiques qui s’avèrent efficaces sont entre autres les programmes de formation, le brûlage culturel ainsi que l’alliage de la science occidentale avec les savoirs traditionnels autochtones. Pour en savoir plus, télécharger le rapport en détail.
Les petits changements ont de grands effets
Il suffirait de canaliser la construction hors des zones à haut risque pour protéger nombre de foyers contre des catastrophes désastreuses, et alléger du même coup la facture pour tous les Canadiens sans limiter la croissance du logement.
Par exemple, si l’on redirigeait seulement 3 % des logements à construire d’ici 2030 loin des zones vulnérables aux inondations et vers des terrains plus sécuritaires, on réduirait le risque d’inondation des nouveaux logements canadiens de 80 %.
Du côté des feux de forêt, 92 % des pertes anticipées dans notre analyse se concentrent dans à peine 20 municipalités – la plupart se trouvant dans trois régions de la Colombie-Britannique. Mieux choisir les méthodes de construction et l’emplacement des nouvelles habitations dans ces régions pourrait réduire considérablement les pertes à venir.

Recommandations
L’important coût économique et humain d’une construction résidentielle malavisée peut être évité à condition que les autorités agissent sans plus tarder. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux peuvent apporter des changements sur cinq axes à leurs politiques pour accélérer le développement résidentiel tout en réduisant les coûts et en préservant les nouvelles habitations contre les inondations et feux incontrôlés.

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5 Les dommages causés par les incendies de forêt sont visibles dans le quartier de Beacon Hill à Fort McMurray, en Alberta, le lundi 9 mai 2016. THE CANADIAN PRESS/Ryan Remiorz