Crédit d'image: Lithion Saint-Bruno, une usine commerciale d'extraction de minéraux critiques récemment achevée à Saint-Bruno-de-Montarville, à l'est de Montréal (Québec), le lundi 3 juin 2024. THE CANADIAN PRESS/Christinne Muschi

Accélérer l’extraction des minéraux critiques pour assurer la transition énergétique

Nous encourageons les gouvernements à devenir partenaires stratégiques dans les projets de minéraux critiques.

Cet article a précédemment été publié dans La Presse.

Les minéraux critiques incarnent la ruée vers l’or du 21e siècle: une course mondiale pour extraire du sol des ressources devenues indispensables pour fabriquer nos téléphones intelligents, panneaux solaires et batteries, et qui seront encore plus convoitées dans les années à venir alors que s’accélère la transition énergétique (une demande qui pourrait atteindre 770 G$ d’ici 2040). Le recyclage de ces matières est souhaitable, mais ne peut pas répondre à l’heure actuelle à l’importante demande. Il faut aller chercher les minéraux enfouis, et le Québec et le Canada en regorgent — pour une valeur de plus de 250 G$ au pays ! —  et en adoptant certaines politiques audacieuses, il serait possible d’accélérer la construction des mines nécessaires, tout en se taillant une place de fournisseur fiable pour le reste du monde. 

Le Québec a produit pour plus de 1,5 milliard de dollars en minéraux critiques l’an dernier — et ce n’est qu’un aperçu du potentiel encore inexploité. La province est particulièrement riche en nickel, un minéral dont les réserves sont estimées à plus de 50 milliards de dollars à l’échelle canadienne, alors que moins de 6 % de cette richesse a été mise en valeur en 2024. Le cobalt est un autre exemple : les réserves canadiennes sont évaluées à plus de 8 milliards de dollars, mais à peine 2,6 % de ce volume a été produit l’an dernier, notamment au Québec. Le sol québécois regorge également de cuivre, de graphite et de lithium — des minéraux essentiels à la transition énergétique et à la fabrication de technologies propres.

Notre recherche conclut que l’un des principaux obstacles à sortir ces minéraux du sol est le risque financier associé aux nouveaux projets, alimenté en grande partie par la volatilité des prix de certains minéraux. C’est ce que nous avons déterminé après plusieurs mois de recherches, d’entretiens menés auprès des grands acteurs du secteur minier — tant au Québec que dans le reste du Canada — et d’une revue rigoureuse de la littérature. Les gouvernements ont un rôle-clé à jouer, tant au niveau fédéral que provincial, pour que nous puissions réaliser notre plein potentiel avec nos minéraux critiques. 

Pour atténuer les incertitudes et attirer des capitaux privés, nous encourageons les gouvernements à devenir partenaires stratégiques : prendre des participations partielles dans les projets ou signer des ententes de partage des risques (qui les interpelleraient que si les prix chutent sous un seuil prédéfini, et en empochant une part des profits lorsque les prix dépassent ce seuil). Un exemple concret de participation gouvernementale : le Fonds de croissance du Canada et Investissement Québec ont investi plus de 70 millions de dollars dans la mine de graphite québécoise Nouveau Monde Graphite, devenant ainsi en partie actionnaires de l’entreprise.

Sortir plus rapidement les minéraux critiques du sol se traduira par des revenus supplémentaires dans les coffres de l’État, qui pourront être réinvestis dans les rénovations d’hôpitaux, la construction de nouvelles écoles et pour assurer l’avenir des programmes qui sont si chers aux Québécois. 

Appuyer sur l’accélérateur ne veut pas dire passer au bulldozer les normes environnementales ou jeter au rencart la question de l’acceptabilité sociale, bien au contraire. Notre recherche démontre que passer outre ces considérations ne fera au contraire que prolonger les délais pour la mise sur pied de nouvelles mines. 

L’admissibilité des projets à des coups de pouce des gouvernements doit comprendre le respect des normes environnementales strictes et la consultation et consentement des peuples autochtones. 

Des voix remettent en question la transition vers les énergies propres face aux récents bouleversements géopolitiques. Pourtant, elle se poursuit avec force; à l’échelle mondiale, la capacité éolienne nouvellement installée atteint des records, la production solaire a doublé au cours des trois dernières années et on estime qu’un quart des voitures vendues en 2025 seront électriques. Pour soutenir cet élan et réduire notre dépendance aux énergies fossiles, il est indispensable d’extraire nos minéraux critiques de nos sols. Non seulement nous pourrons produire sur notre territoire les ressources indispensables à la transition énergétique, mais nous y créerons également des emplois de qualité tout en renforçant notre indépendance économique.

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