Cet article a précédemment été publié dans le National Observer.
Depuis l’entrée en fonction du président Trump en début d’année – qui a bouleversé l’ordre mondial –, le commerce est devenu un enjeu politique national. Et il devrait demeurer une priorité, puisque le premier ministre Carney s’est engagé à doubler les exportations vers des pays autres que les États-Unis au cours des dix prochaines années.
C’est un fait : la diversification de nos marchés d’exportation est essentielle pour assurer la compétitivité des entreprises et la prospérité du pays. L’économie canadienne est devenue trop dépendante de celle de notre voisin du Sud, ce qui la rend particulièrement vulnérable face aux décisions intempestives de ce dernier en matière de droits de douane et d’accords commerciaux.
Or, croyez-le ou non, cette fameuse diversification dépend en partie de la préparation des entreprises aux changements climatiques et à l’évolution des marchés.
Il se trouve que bon nombre des marchés mondiaux les plus vastes et les plus lucratifs sont aussi ceux où la transition énergétique est bien engagée et où la mise en œuvre des politiques climatiques progresse rapidement. Certains figurent d’ailleurs déjà parmi les principaux marchés d’exportation des produits canadiens en dehors des États-Unis. Dans différentes parties du monde (notamment au Royaume-Uni, dans l’Union européenne, en Chine et en Inde), les gouvernements ont adopté des politiques visant à étendre leurs marchés du carbone, à instaurer des taxes carbone et à créer – voire imposer – des normes de divulgation sur la gestion que font les entreprises des risques et des occasions liés au climat. De plus, l’utilisation des énergies renouvelables et des véhicules électriques y croît rapidement, signe d’une transformation de la demande des consommateurs.
Tout cela signifie que les entreprises canadiennes souhaitant vendre sur ces marchés doivent adopter une stratégie commerciale cohérente pour rester compétitives. C’est là que les plans de transition entrent en jeu.
Ce sont de puissants outils – jusqu’ici sous-utilisés – qui peuvent aider les entreprises à être plus résilientes et compétitives dans un contexte de transition énergétique mondiale accélérée et d’aggravation des effets du changement climatique, lesquels sont susceptibles de fragiliser considérablement les actifs et les chaînes de valeur des entreprises.
La planification de la transition aide les entreprises à recenser les principaux risques et occasions liés au climat pour les intégrer dans leur stratégie commerciale et leur planification financière.
Comme l’indique un rapport récent publié avec nos partenaires de Parcours des entreprises de demain, des plans de transition solides peuvent offrir de nombreux avantages aux entreprises canadiennes.
C’est avant tout une question d’accès aux marchés et au financement. Investisseurs, assureurs, clients et autorités de réglementation mettent de plus en plus la pression sur les entreprises afin qu’elles démontrent comment elles comptent rester rentables face aux perturbations climatiques. Or avec un plan de transition bien pensé, elles peuvent améliorer leur capacité à attirer et à obtenir de nouveaux capitaux, car les investisseurs cherchent à anticiper les risques et les occasions climatiques dans leurs portefeuilles. Il est même possible de réduire les coûts d’emprunt; l’accès au crédit s’en trouve facilité d’autant.
Par ailleurs, à mesure que les grandes économies continuent de normaliser et de réglementer les divulgations climatiques et les plans de transition, les entreprises canadiennes vont être de plus en plus contraintes d’élaborer leurs propres plans, ne serait-ce que pour participer aux chaînes d’approvisionnement mondiales.
Parmi les autres avantages de la planification, citons le renforcement des capacités et de la coordination internes de l’entreprise, le classement plus aisé des grands investissements par ordre de priorité, et le rehaussement de la réputation auprès des parties prenantes et du public – un avantage non négligeable à une époque où l’on cherche à éviter les accusations d’écoblanchiment.
L’essentiel pour les entreprises, c’est d’entamer la transition afin de mieux maîtriser les perturbations qui accompagnent l’intensification des changements climatiques et l’évolution des marchés.
Or, malgré ces nombreux avantages, on constate que la plupart des entreprises canadiennes n’ont toujours pas de plan de transition climatique, ou du moins pas de plan public. Elles risquent ainsi de se laisser distancer par leurs concurrentes internationales. Selon la plupart des indicateurs que nous avons consultés, le Canada se situe derrière ses pairs de l’étranger, et l’écart pourrait se creuser à mesure que ces derniers définissent des directives ou des mandats nationaux pour la planification de la transition.
Le monde poursuit sur sa lancée, et davantage d’entreprises canadiennes doivent préparer leur plan de transition pour rester compétitives. Pour ce faire, elles ont besoin de directives nationales et sectorielles définissant les éléments essentiels d’une planification digne de ce nom, ainsi que de cohérence de la part des investisseurs canadiens quant à leurs attentes. Se donnant pour mission de combler cette lacune, Parcours des entreprises de demain collabore avec les milieux financiers canadiens pour publier des orientations pratiques et concrètes grâce auxquelles les entreprises du pays pourront se doter de stratégies de croissance résiliente dans une ère de perturbations climatiques.
Les entreprises qui anticipent les perturbations climatiques se préparent un avenir sous le signe de la réussite – et elles engagent le Canada sur la voie de la diversification des échanges commerciaux et de la compétitivité.