Crédit d'image: THE CANADIAN PRESS/Jeff McIntosh. Farmer installed solar panels to power his irrigation systems on the family farm near Claresholm.

Les priorités environnementales à surveiller dans le budget 2023

Cette année, le budget fédéral peut permettre au Canada d’être à armes égales avec les États-Unis sur le plan de croissance propre. Voici comment.

Lorsque le président Biden s’adressera au Parlement cette semaine, l’encre du prochain budget fédéral sera à peine sèche.

La visite présidentielle tombe à point; en effet, la réponse du Canada à l’Inflation Reduction Act (loi sur la réduction de l’inflation) des États-Unis devrait occuper une place importante dans le budget 2023.

Mais la façon dont Ottawa peut jeter les bases d’une économie compétitive et florissante n’est pas la seule priorité que nous surveillons dans ce budget : le gouvernement doit également garder le cap sur les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de réduction de la pollution du Canada, et donner suite à ses intentions de déployer des mesures ciblées visant à rendre la vie plus abordable.

Avec des politiques judicieuses, il pourrait réaliser ces trois objectifs d’un coup. Comment? Examinons les deux plus grandes priorités stratégiques en environnement auxquelles ce budget peut s’attaquer : les investissements propres et l’électricité propre.

Priorité no 1 : Attirer des investissements et stimuler la concurrence propre

Si l’ampleur des investissements américains dans les solutions climatiques est bienvenue, elle risque également d’engendrer une fuite des capitaux et des projets de croissance propre chez notre voisin du Sud. Pour se monter à la hauteur, le Canada doit déployer une réponse bien de chez nous. Dans cet ordre d’idées, nous avons formulé sept recommandations pour tirer profit des investissements publics visant à contribuer à la compétitivité du Canada dans la transition énergétique mondiale.

Nous attendons notamment des précisions dans le budget 2023 sur les incitatifs du Fonds de croissance du Canada au secteur privé pour l’investissement dans de nouveaux projets d’énergie propre. Que ce soit par l’électricité propre, l’hydrogène ou le captage et le stockage du CO₂, les projets de croissance propre apportent de nouvelles sources de croissance économique. Ils peuvent procurer un nouvel avantage au Canada dans les marchés mondiaux qui se disputent un bassin croissant de capitaux verts et de transition.

Mais la façon dont le budget favorisera la croissance propre importe – surtout lorsqu’il est question du coût de la vie. La simple reproduction de l’Inflation Reduction Act au Canada constituerait une proposition coûteuse, que les contribuables paieraient aujourd’hui et demain, et qui risquerait d’alimenter l’inflation. Heureusement, le Canada a un atout dans sa manche que les États-Unis n’ont pas dans la course à la croissance propre : la tarification du carbone.

Fixer un prix pour la pollution incite fortement les entreprises à investir; l’État peut et devrait intervenir de manière plus ciblée pour soutenir les projets et les entreprises. Par exemple, privilégier les contrats carbone pour différence plutôt que les subventions directes générerait une stabilité politique pour les investisseurs privés – le risque étant partagé plutôt que porté par l’État – qui pourrait les inciter à investir dans les projets de croissance propre.

Priorité no 2 : Un réseau électrique plus grand, plus propre et plus intelligent

Le budget 2023 est aussi l’occasion d’investir dans le pilier d’une trajectoire vers un avenir sobre en carbone, concurrentiel et abordable pour le Canada : un réseau électrique plus grand, plus propre et plus intelligent.

Bien faite, la transition des combustibles fossiles vers l’électricité propre peut occasionner une baisse de tarifs d’électricité pour les consommateurs  à long terme. Une électricité propre, abondante et abordable est également un incontournable pour attirer de nouveaux investissements privés. Mais cela ne va pas sans un développement considérable de l’électricité propre – dont les coûts ne font que baisser – et de l’infrastructure qui s’y rattache. Et pour y arriver, il faudra que les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral rament dans le même sens.

Le budget 2023 devrait catalyser cette transition. Les crédits d’impôt à l’investissement fédéraux (dont il a été question dans l’Énoncé économique de l’automne) seront déterminants pour la mobilisation des investissements en électricité – surtout s’ils sont appliqués largement à tous les types de production propre et si les services publics en bénéficient. L’élargissement des programmes existants, en particulier le soutien pour relier les réseaux provinciaux, serait également utile. Ces mesures font porter une partie du fardeau économique des consommateurs aux contribuables, un facteur d’abordabilité et d’équité pour les tarifs d’électricité.

Le budget pourrait également marquer le début d’un véritable électro-fédéralisme, où le gouvernement fédéral fournit des fonds supplémentaires importants aux provinces pour investir de manière descendante dans leurs réseaux électriques. En assortissant ce financement de certaines conditions essentielles (obliger les autorités de réglementation et les services publics des provinces à atteindre des objectifs climatiques, mandater des évaluations de trajectoires indépendantes et élaborer des plans énergétiques complets), le gouvernement fédéral pourrait stimuler le développement nécessaire des réseaux électriques provinciaux – sans pour autant empiéter sur la compétence provinciale en matière d’électricité.

À surveiller dans le budget 2023

Le budget 2023 représente une occasion réelle et tangible de réaliser d’importants objectifs – à la fois pour l’économie tout entière et pour le portefeuille des ménages canadiens – tout en rapprochant le pays de ses cibles climatiques pour 2030 et 2050.

Dans cette optique, voici les éléments que nous allons surveiller :

  1. Des lignes directrices précises, pour que le Fonds de croissance du Canada mobilise des investissements dans les projets de croissance propre, et le fasse rapidement.
  2. Une stratégie de financement publique qui utilise les contrats carbone pour différence afin de mettre à profit la tarification du carbone du Canada en soutien aux projets de croissance propre.
  3. Des incitatifs clairs sous forme de crédits d’impôt à l’investissement pour le secteur de l’électricité et d’autres mesures, comme le financement des connexions réseau interprovinciales.
  4. Un engagement à poursuivre, en partenariat avec les provinces, une approche d’électro-fédéralisme conçue pour entraîner les améliorations nécessaires du réseau électrique canadien. 

Si le budget 2023 vise juste sur ces priorités, il constituera un grand pas vers l’avant – pour le climat, pour la compétitivité et pour une vie plus abordable.

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