Cet article a précédemment été publié dans Corporate Knights.
Les changements climatiques et l’abordabilité sont intimement liés; en effet, chaque année, les répercussions des changements climatiques coûtent déjà 720 $ en moyenne à la population canadienne en raison des réparations après une inondation ou un feu incontrôlé, par exemple. En outre, le prix est appelé à doubler ou tripler d’ici 2050.
La réduction des émissions peut contribuer à atténuer ces effets et les coûts afférents. L’Institut climatique du Canada a exploré en profondeur les voies qui s’offrent au Canada pour atteindre la carboneutralité, et nul doute que la volte-face des combustibles fossiles à l’électricité propre est l’une des pierres angulaires de la vision d’un Canada carboneutre et une nécessité pour la concurrentialité du pays.
Notre dernière analyse révèle également un autre avantage de taille : cette transition permettra de diminuer la part du revenu des Canadiens consacrée à l’énergie.
Plus précisément, nos calculs les plus récents montrent qu’en moyenne, les coûts énergétiques diminueront d’environ 12 % d’ici 2050 (la cible du Canada pour l’atteinte de la carboneutralité), même en tenant compte des investissements nécessaires à l’installation d’équipement résidentiel et à l’expansion des réseaux. Et ce pourcentage ne tient même pas compte des politiques existantes visant à alléger le fardeau financier des ménages pour la transition (par exemple, les incitatifs pour les véhicules électriques, les subventions pour les rénovations résidentielles et les remises de la tarification du carbone). Bien que ce résultat puisse en surprendre plus d’un, deux Canadiens sur trois y croient déjà, selon un sondage récent.
Pensez à l’argent que vous dépensez chaque année pour faire le plein de votre véhicule. En moyenne, les Canadiennes et Canadiens qui parcourent 15 000 km par année dépenseront 2 000 $ en essence (sans compter la récente hausse des prix du pétrole), alors qu’il leur en coûterait 350 $ par année pour un véhicule électrique. Les moteurs électriques sont deux fois plus efficaces que les moteurs à combustion pour convertir leur source d’énergie en énergie cinétique. Ainsi, même si les tarifs d’électricité moyens augmentent en raison de l’expansion des réseaux pour répondre à la demande, le coût total de propriété et d’utilisation d’un véhicule électrique demeure tout de même plus économique. D’ailleurs, les consommateurs commencent à s’en rendre compte : environ 10 % des véhicules vendus au Canada l’an dernier étaient électriques. Bien que ceux-ci soient toujours plus chers à l’achat, le coût des batteries a chuté de plus de 90 % depuis 2010. Et plus la part de marché de ces véhicules augmentera, plus les économies d’échelle et l’expérience feront baisser leur coût. Selon certaines sources, il pourrait y avoir parité des prix d’ici cinq ans, sans subventions.
Dans le même ordre d’idées, les thermopompes (qui servent à la fois à chauffer et à climatiser et sont généralement trois fois plus efficaces que les plinthes électriques et les chaudières au gaz) offrent aux consommateurs un retour sur l’investissement; cependant, il sera important de continuer à couvrir une partie des coûts de l’équipement pour les rendre accessibles, même si les coûts sont à la baisse. Les occasions de financement, par exemple des prêts à faible taux d’intérêt, peuvent permettre aux ménages d’absorber les coûts d’achat et d’obtenir plus rapidement un retour sur leur investissement (ces subventions existent déjà, mais elles sont parfois trop complexes).
L’abordabilité n’est pas qu’une question de prix moyens : c’est aussi une question de stabilité. Les prix des combustibles fossiles sont beaucoup plus volatils, comme l’ont démontré les flambées record des prix de l’essence et du gaz découlant de la guerre en Ukraine. Pour les ménages, les hausses de prix entraînent des problèmes de liquidité; une volte-face vers les véhicules et le chauffage électriques peut éviter aux Canadiennes et Canadiens de se retrouver devant des choix budgétaires soudains et difficiles en raison de la conjoncture mondiale.
Les données le confirment : de nombreuses études américaines montrent que les prix de l’électricité sont plus stables et prévisibles que ceux de l’essence et du gaz pour la consommation intérieure, et ce, même avant la crise en Ukraine. De plus, selon l’Agence internationale de l’énergie, une trajectoire vers la carboneutralité permet non seulement de réduire les factures énergétiques de ménages, mais également de protéger ceux-ci des flambées des coûts énergétiques à l’échelle planétaire, réduisant les coûts de 40 % en de telles périodes par rapport au statu quo.
Bien sûr, l’électrification généralisée présente son propre lot de défis. Les ménages à faible revenu et les locataires, en particulier, risquent de ne pas pouvoir tirer leur épingle du jeu. Par exemple, bien que ce soient les locataires qui paient la facture d’énergie, ce sont les propriétaires qui choisissent les systèmes de chauffage. Les ménages à faible revenu seront probablement parmi les derniers à délaisser les combustibles fossiles; ainsi, le coût du maintien des systèmes à l’énergie fossile leur incomberait de manière disproportionnée. Des politiques réfléchies permettront à l’ensemble de la population canadienne de profiter de tous les avantages de l’électrification.
Bien exécutée, la transition énergétique ne sera pas seulement bénéfique pour l’environnement ou l’économie, mais elle sera également avantageuse financièrement.