Verdir Vancouver, une maison à la fois

La réduction des émissions des bâtiments peut être difficile, ce sont des actifs à longue durée de vie – mais ce n’est pas impossible.

En 2011, Vancouver a résolu de devenir l’une des villes les plus vertes du monde, cible qu’elle a fixée à 2020. Si la tâche ambitieuse, s’est révélée ardue, la Ville a récemment adopté un règlement municipal sans précédent qui réduira les émissions de gaz à effet de serre (GES) de toutes les nouvelles habitations. C’est un grand pas vers l’atteinte des objectifs établis dans le plan de 2016 pour des bâtiments à émissions nulles ainsi que dans le rapport de 2019 sur l’intervention d’urgence en matière de climat de Vancouver.

Plus important encore, les progrès de Vancouver créent un effet d’entraînement. Le nouveau règlement municipal se rapproche des démarches provinciales et nationales visant à améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments. Si d’autres gouvernements suivent l’exemple de Vancouver, il pourrait s’avérer plus facile qu’on le pense de réduire son empreinte écologique à partir de la maison.

Modifications au règlement municipal sur les bâtiments de Vancouver

À la fin du mois dernier, le conseil municipal a approuvé un ensemble de modifications au code du bâtiment de Vancouver, dont le but est de réduire les émissions de carbone des nouvelles habitations unifamiliales et multifamiliales. Voici les principales modifications :

  1. Ajout d’exigences pour la construction de bâtiments résidentiels de trois étages et moins afin que le chauffage et l’eau chaude ne génèrent aucune émission (ex. : thermopompe).
  2. Diminution du plafond d’émission de carbone des habitations de grande taille (plus de 325 m2, ou environ 3 500 pi2), qui passe de trois tonnes par an à deux.
  3. Harmonisation des exigences en matière de bâtiments avec l’Energy Step Code de la Colombie-Britannique et l’initiative nationale ENERGY STAR.
  4. Révision des exigences actuelles pour qu’il soit obligatoire de doter les nouveaux logements unifamiliaux et bifamiliaux d’une borne de recharge pour véhicules électriques (comme dans le cas des habitations multifamiliales).

Que signifient ces changements pour Vancouver?

Avantages pour le climat, coût relativement faible

Les nouvelles exigences relatives aux bâtiments vancouvérois s’attaquent aux principales sources d’émissions de la ville. L’utilisation de gaz naturel pour le chauffage et l’eau chaude arrive au premier rang de ces sources d’émissions (56 % des émissions totales en 2018). Vient ensuite l’utilisation d’essence et de carburant diesel dans les véhicules, qui représentait 38 % des émissions totales de Vancouver en 2018. Les dernières modifications au règlement municipal ont pour but de régler le problème à la source : les nouvelles maisons devront être dotées de chauffage à émissions nulles et de bornes de recharge résidentielles, un facteur clé pour l’adoption de l’automobile électrique.

Il est attendu que ces changements réduisent de façon mesurable les émissions de Vancouver. Dans un rapport, l’administration municipale estimait qu’avec les nouvelles exigences relatives au chauffage et à l’eau chaude, les habitations produiraient 63 % moins de pollution par le carbone que les maisons semblables respectant le règlement municipal de 2019, et 86 % de moins que celles qui avaient été construites selon les normes de 2007.

Soulignons en outre qu’aucune des modifications proposées ne s’annonce trop coûteuse pour les propriétaires, particulièrement si l’on tient compte du coût potentiel des rénovations à faire par la suite. L’effet de coût des nouvelles exigences devrait, en moyenne, être inférieur à 0,5 % du prix de vente des nouvelles habitations, et les améliorations devraient entraîner des économies mensuelles pour la plupart des propriétaires et des locataires concernés.

De la même façon, les coûts liés à la capacité de recharge de véhicules électriques dans tous les nouveaux espaces de stationnement résidentiels ne devraient pas être trop importants. Prenons l’exemple de la ville de Port Coquitlam, où l’on avait estimé le coût d’installation de bornes de recharge de niveau 2 au moment de la construction entre 60 et 350 dollars pour les maisons unifamiliales et entre 200 et 1 150 dollars pour les habitations multifamiliales (des coûts nettement inférieurs à ceux de l’installation après coup).

Coûts d’installation mis à part, la croissance de la proportion de véhicules électriques en ville aurait pour avantage d’améliorer la qualité de l’air. Si l’on tient compte des coûts sociaux de la pollution, les retombées globales du nouveau règlement municipal pourraient être substantielles.

Vague de changements

Les modifications apportées au règlement municipal de Vancouver sont certes importantes en elles-mêmes, mais c’est sans compter qu’elles s’inscrivent dans les démarches entreprises à plus grande envergure dans la province et d’un bout à l’autre du pays pour réduire les émissions des bâtiments.

L’Energy Step Code de la Colombie-Britannique a déjà été adopté par plus de 60 municipalités, dont un grand nombre se trouve dans les environs de Vancouver. Par l’ajout d’une nouvelle voie à suivre en matière d’efficacité, conforme au quatrième niveau de l’Energy Step Code, le nouveau règlement municipal rapproche Vancouver de la province et de bien d’autres municipalités. Cette évolution uniformise en même temps les exigences qui s’appliquent au secteur de la construction d’un endroit à l’autre. Enfin, comme le nouveau règlement se fonde sur l’efficacité, les constructeurs jouissent d’une plus grande souplesse de conception, ce qui favorise à la fois l’innovation et la réduction des coûts.

Plusieurs des nouvelles exigences du règlement municipal de Vancouver correspondent en outre à celles du programme national ENERGY STAR, ce qui contribuera à la création par les petits fabricants de produits destinés au marché national.

Le règlement sur les bâtiments de Vancouver est un levier politique essentiel qui vient s’ajouter à la boîte à outils de la ville. Précisons toutefois que la possibilité pour le conseil municipal de Vancouver d’adopter son propre règlement sur les bâtiments est unique en Colombie-Britannique et rare au pays. Dans la plupart des cas, ce sont les provinces qui jouent un rôle crucial : il leur revient d’octroyer aux villes la capacité de prendre ces mesures, à l’image de la Colombie-Britannique, qui a outillé toutes ses municipalités au moyen de son Energy Step Code.

Quelle que soit la répartition des compétences, le règlement municipal de Vancouver peut servir de modèle aux autres gouvernements qui cherchent à bâtir des milieux de vie plus verts. Au fur et à mesure que de nouveaux gouvernements adopteront ces normes de construction sans émission, la hausse de la demande en matériel de construction à faible empreinte carbone fera diminuer les coûts, ce qui rendra les habitations à émission zéro plus abordables et accessibles.

Jeter les bases d’un avenir vert

Il peut être difficile de réduire les émissions des bâtiments, car le stock de capital de ces actifs à long terme se renouvelle très lentement. Ainsi, les mesures prises aujourd’hui dans le secteur ont le potentiel de limiter les émissions pour longtemps. Comparativement aux politiques qui exigent la rénovation des biens existants, celles qui visent les nouveaux bâtiments mettent du temps à montrer des résultats, mais elles sont moins coûteuses et peuvent s’accompagner d’énormes retombées à long terme.

S’il est vrai que Vancouver n’a encore jamais été proclamée ville la plus verte du monde, affirmation qui serait de toute façon subjective, elle n’a cessé de faire preuve d’un grand leadership environnemental, en particulier pour ce qui est de verdir le secteur du bâtiment. Son plan pour des bâtiments à émissions nulles a fait d’elle l’une des rares villes du monde à posséder une stratégie de bâtiments à énergie zéro d’ici 2030, et l’évolution récente de son règlement municipal marque déjà un pas dans la bonne direction.

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