En août 2024, les restes de l’ouragan Debby ont apporté au Québec des inondations battant tous les records et touchant 55 collectivités. Seulement un mois auparavant, près de 10 centimètres de pluie sont tombés à Toronto en trois heures, ont submergé l’infrastructure de la ville et inondé bon nombre de logements et d’entreprises. En Colombie-Britannique en novembre 2021, une rivière atmosphérique a déclenché des pluies records, entraînant des glissements de terrain et des inondations causant des dégâts considérables, coupant des voies d’accès principales à plusieurs régions de la province, entravant ainsi gravement l’économie.
À mesure que les changements climatiques s’accentuent, la population canadienne connaîtra une augmentation significative de la fréquence et de l’intensité de ces types d’inondations. Des concentrations croissantes dans l’atmosphère de gaz retenant la chaleur réchauffent l’air, qui emmagasine davantage d’humidité, entraînant de plus fortes précipitations et des orages plus intenses. Combiné à la fonte du manteau neigeux, à l’élévation du niveau de la mer et aux changements des modèles météorologiques, cela crée des conditions menant à des inondations plus sévères et plus imprévisibles. Ces inondations dévastent les collectivités, les économies et les moyens de subsistance.
Les changements climatiques entraînent des inondations de plus en plus sévères et fréquentes
- En raison des changements climatiques, la plupart des régions du pays recevront davantage de précipitations, des pluies plus abondantes et extrêmes et des tempêtes côtières plus violentes (Zhang et coll. 2019; Vasseur et coll. 2017).
- Des recherches signalent que les changements climatiques intensifient de nombreux facteurs contributifs qui se combinent pour accroître les risques d’inondation, notamment des précipitations plus abondantes et des ondes de tempêtes amplifiées par l’élévation du niveau des mers (Denchak 2023; Greenan et coll. 2019).
- Le réchauffement climatique signifie que l’air plus chaud peut retenir davantage d’eau que l’air plus frais, accroissant le risque d’événements pluvieux plus abondants et plus extrêmes. Davantage de précipitations tomberont probablement en événements plus courts et plus intenses plutôt que de façon répartie sur une plus longue période (Westra et coll. 2014).
- Des événements pluvieux de courtes durées, de plus en plus fréquents et violents augmentent la probabilité de crues éclair, en particulier dans les régions urbaines, submergeant les égouts pluviaux et les réseaux d’évacuation (Westra et coll. 2014; Sandink 2015; Brown et coll. 2021).
- Des parties du sud de la Colombie-Britannique, de l’Ontario, du Québec et des Provinces atlantiques ont enregistré une hausse de deux ou trois journées de fortes pluies par an en moyenne (Zhang et coll. 2019; Vincent et coll. 2018).
- Les modèles climatiques projettent que d’ici la fin du siècle, un événement pluvieux extrême se produisant actuellement tous les 20 ans au Canada pourrait se produire tous les cinq ans; et le volume de précipitations extrêmes sur 24 heures se produisant tous les 20 ans en moyenne devrait augmenter de 12 % (Zhang et coll. 2019).
Les inondations peuvent gravement endommager les logements et l’infrastructure, coûtant des milliards de dollars
- Les inondations sont les catastrophes les plus courantes et les plus coûteuses au Canada. Au cours des dix dernières années, les inondations ont entraîné en moyenne près de 800 millions de dollars en dommages assurés chaque année (Bureau d’assurance du Canada 2024).
- Les assureurs estiment que pour chaque dollar de dommages assurés causés par une inondation, deux dollars de dommages non assurés sont assumés directement par les ménages et les contribuables (Honegger et Oehy 2016).
- Plus de 1,5 million de logements dans l’ensemble du pays se trouvent dans des zones à risque élevé d’inondation (Ness et Florez Bossio 2024). Quatre-vingts pour cent des villes canadiennes sont construites, dans leur intégralité ou en partie, dans des plaines inondables (Sécurité publique Canada 2022).
- À mesure que les précipitations extrêmes et les inondations côtières augmentent, les coûts annuels des dommages que causent les inondations aux logements et aux bâtiments au Canada pourraient être multipliés par trois à cinq d’ici le milieu du siècle (représentant plus de 5,5 milliards de dollars) et atteindre jusqu’à 13,6 milliards de dollars d’ici la fin du siècle (Ness et coll. 2021).
- Le 16 juillet 2024, à Toronto, près de 10 centimètres de pluie sont tombés en trois heures, entraînant des inondations massives dans la ville. Les premières estimations établissent le coût de cette inondation à un milliard de dollars de dommages assurables; les coûts totaux étant probablement plusieurs fois plus élevés (Pereira 2024).
- Le Canada a enregistré cinq inondations coûtant plus d’un milliard de dollars depuis 2011 (Bureau d’assurance du Canada 2023; Manitoba Flood Review Task Force 2013; Bureau d’assurance du Canada 2024; Sécurité publique Canada 2023).
- De nombreux propriétaires canadiens croient que leurs assurances paieront les réparations et la reconstruction après une inondation par ruissellement; cependant, seulement environ 10 à 15 % des ménages sont en fait couverts (Posadzki 2017).
- Les ménages confrontés au risque le plus élevé d’inondation au Canada ne peuvent obtenir d’assurance contre les inondations ou n’ont pas les moyens de s’en prémunir du fait de leurs tarifs élevés (Sécurité publique Canada 2022).
Explorez l’indicateur des coûts climatiques pour visualiser les évènements climatiques alimentés par les changements climatiques au Canada.
Des inondations plus fréquentes et plus intenses présentent des risques pour les gens et les collectivités
- De fortes chutes de pluie peuvent submerger les petits systèmes de traitement de l’eau potable, dégradant la qualité de l’eau et accroissant le risque de flambées de maladies hydriques (Wang et coll. 2018).
- Plus de la moitié des flambées de maladies hydriques au cours des 50 dernières années aux États-Unis ont eu lieu après des épisodes de précipitations extrêmes (Charron et coll. 2011).
- Les inondations peuvent être mortelles, car des gens se noient en traversant des eaux de crue à pied ou en véhicule ou en se retrouvant piégés dans des bâtiments inondés (Gouvernement du Canada 2021).
- Les blessures sont courantes pendant et après des crues du fait des déplacements rapides d’objets pesants, de câblage et d’équipement électriques endommagés et du risque d’hypothermie due à des eaux de crue froides (Gouvernement du Canada 2021).
- Les répercussions psychosociales d’une inondation sont significatives, accroissant les conflits familiaux, les tensions financières et le sentiment d’isolement. Dans certains cas, une inondation peut déclencher ou exacerber des problèmes de santé mentale, comme la dépression et des troubles de stress post-traumatique (Glenn et Myre 2022).
- Quelques mois après les inondations au Québec en 2019, 44 % des personnes touchées présentaient des symptômes modérés à élevés de stress post-traumatique, 21 %, des symptômes de troubles anxieux, et 20 %, des troubles de l’humeur (Institut national de santé publique du Québec 2024).
- Les bâtiments inondés sont rapidement colonisés par des moisissures, des champignons et des bactéries qui peuvent entraîner ou aggraver des problèmes cutanés, allergiques, oculaires, respiratoires et gastro-intestinaux, comme l’asthme, la conjonctivite et l’otite (Institut national de santé publique du Québec 2024).
Les administrations publiques peuvent agir pour protéger les collectivités de l’exacerbation des risques d’inondation
- Les inondations s’aggraveront à mesure que la concentration de gaz retenant la chaleur continue d’augmenter dans l’atmosphère. Des mesures gouvernementales pour gérer ce risque croissant et limiter l’ajout d’émissions sont essentielles.
- Parce que les répercussions des changements climatiques sur les inondations se font déjà sentir et s’accentuent du fait des émissions passées, les collectivités et les gouvernements doivent collaborer pour s’adapter et se préparer au risque accru d’inondations aujourd’hui et à l’avenir.
- Certaines des principales mesures d’adaptation que les administrations publiques doivent prendre pour réduire les risques d’inondation et protéger les collectivités sont les suivantes :
- éloigner les aménagements immobiliers des zones à risque élevé d’inondation : pour éviter de mettre davantage de logements en danger, les administrations publiques provinciales et municipales pourraient limiter les constructions dans les zones à risque élevé d’inondation; dans les zones à risque modéré ou celles enclines à des inondations urbaines, il est essentiel de concevoir de nouveaux aménagements à l’épreuve des inondations pour réduire au minimum les dégâts d’eau (Banque mondiale 2017);
- améliorer l’infrastructure de protection contre les inondations au niveau des collectivités : investir dans une infrastructure neuve et améliorée de protection contre les inondations, comme des digues, des murs de protection contre les crues et des solutions fondées sur la nature, peut contribuer à protéger de manière rentable les collectivités à risque contre les inondations (Ness et coll. 2021);
- soutenir une relocalisation proactive hors des zones présentant un risque élevé : dans quelques zones où le risque d’inondation est trop élevé pour pouvoir fournir une protection appropriée, les administrations publiques devraient communiquer avec les propriétaires et les collectivités afin d’envisager une relocalisation proactive, en offrant une assistance adéquate et des incitations leur permettant de déménager dans des zones plus sécuritaires (Sécurité publique Canada 2022).
Références et ressources
- Grondement à l’horizon : trois mesures que doivent prendre les gouvernements pour protéger les propriétaires et les locataires des enjeux d’assurance (Bourque 2022)
- Les évènements météorologiques extrêmes et le changement climatique : guide pour les journalistes (Clark et Otto 2024)
- Submergés : Les coûts des changements climatiques pour l’infrastructure au Canada (Ness et coll. 2021).
Spécialistes disponibles pour obtenir des commentaires et des renseignements contextuels sur ce sujet
- Ryan Ness est directeur de recherche en mesures d’adaptation à l’Institut climatique du Canada et chercheur principal de la série Les coûts des changements climatiques de l’Institut (heure de l’Est, anglais et français).
- Sarah Miller est chargée de recherche principale en mesures d’adaptation à l’Institut climatique du Canada (heure du Pacifique, anglais).
Pour de plus amples détails ou pour interviewer un spécialiste, veuillez communiquer avec :
Claudine Brulé
Spécialiste des communications et des relations avec les médias
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