La tarification du carbone et les systèmes d’échanges pour les grands émetteurs au Canada

DOCUMENT D’INFORMATION

Décembre 2024

Tarification du carbone au Canada

Selon la législation canadienne, chaque province ou territoire est libre d’établir sa propre tarification du carbone, ou d’adopter le système fédéral comme filet de sécurité. Pour assurer l’harmonisation des différents systèmes, il existe toutefois un seuil fédéral, qui fixe des normes nationales minimales.

En outre, chaque province et territoire dispose en fait de deux systèmes de tarification : une tarification du carbone à la consommation (souvent appelée la « taxe sur le carbone ») pour les carburants utilisés par les particuliers et les petites entreprises, et une tarification du carbone industriel pour les grands émetteurs comme les producteurs d’acier ou de ciment.

Afin de protéger les industries tributaires du commerce, les systèmes de tarification du carbone industriel demandent aux grandes installations de ne payer qu’une fraction de la tarification sur leurs émissions totales. Cette approche crée des marchés sur lesquels les entreprises peuvent acheter et vendre des droits d’émission; ce sont les systèmes d’échanges pour les grands émetteurs.

Fonctionnement des systèmes d’échanges pour les grands émetteurs

Les systèmes d’échanges pour les grands émetteurs visent à encourager la réduction des émissions à moindre coût afin de limiter l’exode des producteurs vers d’autres pays moins stricts (les « fuites de carbone »).

Ils se divisent en deux grandes catégories : les systèmes basés sur l’intensité d’émissions et les systèmes de plafonnement et d’échange.

Le premier type de systèmes impose des normes sur l’intensité des émissions. Si une installation affiche une intensité d’émissions inférieure à la norme, elle obtient des crédits qu’elle peut vendre à d’autres entreprises ou mettre en réserve pour plus tard. À l’inverse, si une installation dépasse le seuil, elle doit compenser les excès d’émissions en achetant les crédits d’autres entreprises ou des crédits compensatoires (lorsque c’est possible), ou encore payer un prix fixe. Le prix du carbone augmente et les normes se resserrent au fil du temps pour assurer une baisse progressive des émissions.

Le second type, les systèmes de plafonnement et d’échange, exige que les installations obtiennent des droits d’émission : certains sont accordés d’office (les « quotas gratuits »), mais le reste doit être acheté aux enchères. Le prix du carbone est donc variable, quoique tout de même balisé par un plancher et un plafond. Les entreprises peuvent ensuite s’échanger les droits d’émission achetés. Le plafond en vigueur dans tout le système et la quantité de quotas gratuits diminuent au fil des ans pour faire monter le prix et abaisser les émissions.

Différences entre les systèmes d’échanges pour les grands émetteurs

Au Canada, on dénombre neuf systèmes d’échanges différents pour les grands émetteurs (figure 1). Ils se distinguent par exemple par les seuils d’émissions définis pour la participation, et par la disponibilité ou non de crédits compensatoires.

Mais ce sont les systèmes basés sur l’intensité d’émissions qui présentent la différence la plus marquée : certains imposent des normes par secteurs, tandis que d’autres optent pour des seuils fondés sur les émissions passées de chaque installation. Cette seconde approche entraîne moins de coûts, mais récompense moins fortement les entreprises les plus performantes. Le resserrement progressif des normes imposées varie aussi d’un système à l’autre.

Comparaison des systèmes et des caractéristiques régionales

Le système de tarification fondé sur le rendement (STFR) fédéral est utilisé au Manitoba, à l’Île-du-Prince-Édouard, au Nunavut et au Yukon. Puisqu’il s’agit d’un système basé sur l’intensité d’émissions conçu pour être appliqué n’importe où au pays, les normes ne sont pas aussi précises que dans d’autres systèmes. Les revenus sont redistribués aux provinces et territoires de provenance par transfert direct ou par l’intermédiaire de programmes fédéraux.

L’Alberta utilise aussi un système basé sur l’intensité d’émissions, défini dans le règlement Technology Innovation and Emissions Reduction (TIER). La province étant responsable d’environ 60 % des émissions industrielles au Canada, son système d’échanges pour les grands émetteurs se trouve à être le plus important au pays. La plupart des normes de performance du TIER sont adaptées à chaque installation. En outre, le système comporte des mécanismes uniques de contrôle des coûts.

La plupart des provinces ont également un système basé sur l’intensité d’émissions. Le STFR de la Colombie-Britannique, contrairement à la majorité, utilise principalement des normes par secteurs. Les STFR de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick se ressemblent beaucoup, mis à part quelques dispositions particulières pour les installations fonctionnant à la biomasse au Nouveau-Brunswick. Voir le tableau 1 pour en savoir plus sur ces systèmes, le Programme des normes de rendement à l’égard des émissions de l’Ontario et le programme de STFR de la Saskatchewan.

Le système de plafonnement et d’échange du Québec est unique en son genre au Canada. Membre de la Western Climate Initiative avec la Californie (et peut-être bientôt l’État de Washington), la province a accès à un marché d’échanges encore plus grand que celui de l’Alberta. La liquidité de ce marché, de même que la disponibilité de crédits compensatoires à faible coût, font en sorte que le Québec affiche le plus bas prix du carbone au Canada.

La taxe sur le carbone industriel des Territoires du Nord-Ouest est également unique, car elle prend la forme d’une redevance sur les combustibles plutôt que d’un système d’échanges. Afin de réduire les coûts pour les grands émetteurs, le territoire offre une remise équivalente à une grande portion de la taxe sur le carbone.

Le tableau 1 ci-dessous présente le détail des différents systèmes canadiens.

Tableau 1 : Comparaison des systèmes d’échanges pour les grands émetteurs au Canada