Sans intervention gouvernementale, les changements climatiques accentueront les inégalités en santé entre les riches et les pauvres
Malheureusement, la COVID-19 n’est pas la seule crise sanitaire à sévir au Canada. Pendant que tous les regards sont tournés vers le nombre de cas et les taux de vaccination, les changements climatiques continuent de nuire à la santé de tous – et tout indique que la situation s’aggravera au cours des prochaines décennies. Les changements climatiques creuseront la fracture socioéconomique qui fait que les personnes défavorisées risquent davantage d’être en mauvaise santé. Et si le pays ne se prépare pas adéquatement, les changements climatiques lui coûteront des milliards de dollars en raison de la multiplication des maladies, de l’augmentation des coûts en santé et de la perte de productivité.
L’adaptation aux changements climatiques, bien souvent reléguée au second plan, est parfois vue comme un aveu d’échec – une action à entreprendre si la société échouait à réduire suffisamment ses émissions de gaz à effet de serre. Toutefois, même s’il est primordial d’agir pour limiter le réchauffement climatique, ce l’est également pour se préparer aux changements déjà enclenchés. Même si le Canada et le monde entier arrivaient à atteindre la carboneutralité d’ici 2050, nous savons déjà que les émissions passées entraîneront des perturbations au cours des prochaines décennies, et le meilleur moyen de les réduire au minimum est de comprendre les formes qu’elles risquent de prendre et d’agir en amont.
C’est précisément ce que tente de faire l’Institut climatique du Canada, un organisme indépendant de recherche sur les politiques climatiques, en dévoilant de nouvelles analyses qui présentent un bilan détaillé des coûts en santé que pourraient entraîner les changements climatiques au Canada et qui ciblent les investissements susceptibles d’avoir le plus de répercussions. Dans son rapport intitulé Les coûts des changements climatiques pour la santé : Comment le Canada peut s’adapter, se préparer et sauver des vies, l’Institut lance un avertissement quant aux principales répercussions sur la santé et sur la prospérité de la population canadienne, tout en donnant l’espoir que des actions entreprises aujourd’hui puissent amoindrir les coûts en santé et les pertes de vies.
Pour nous préparer aux répercussions des changements climatiques sur la santé, nous devons nous attaquer aux causes premières des vulnérabilités : la pauvreté, l’itinérance et l’insécurité alimentaire. Celles-là mêmes qui sont responsables du fait que certaines populations – les personnes noires, les Autochtones et les personnes de couleur – ont été plus durement affectées par les répercussions tant sanitaires qu’économiques de la COVID-19. Il en va de même pour les répercussions des changements climatiques sur la santé, et l’accroissement des inégalités pourrait aggraver cette situation.
Les inégalités augmentent au Canada, entraînant la hausse des iniquités en santé. À titre d’exemple, une étude récente de Statistique Canada démontre que les hommes dont le revenu se classe dans le quintile supérieur vivent en moyenne huit ans de plus que ceux dont le revenu se trouve dans le quintile inférieur, et l’écart se creuse sans cesse.
Dans les faits, la santé et l’espérance de vie d’une personne sont davantage tributaires de son lieu de résidence que de son code génétique. Au Canada, le revenu, l’éducation, l’accès à un logement de qualité, la sécurité alimentaire et l’accès à l’eau potable influencent l’état de santé des individus, des quartiers et des collectivités, et les iniquités entre les mieux et les moins nantis augmentent continuellement.
Les conséquences sanitaires des changements climatiques ne sont peut-être pas aussi visibles et fulgurantes que celles de la COVID-19, mais elles pourraient s’avérer aussi mortelles. Au Canada, il est grandement temps de prendre plus au sérieux la nécessité de se préparer à ces conséquences. Au cours des cinq dernières années, 12 % du financement fédéral en matière de changements climatiques a été alloué à en réduire les risques, tandis que seulement 0,3 % a été consacré à en prévenir les répercussions sur la santé.
La santé, ça commence à la maison, au travail et dans la collectivité. Investir aujourd’hui dans des mesures d’adaptation aux changements climatiques, notamment en s’attaquant aux facteurs socioéconomiques qui nuisent à la santé, permettra de sauver des vies et d’améliorer la qualité de vie des prochaines générations.
Publié à l’origine par iPolitics.